Lundi 12 mars 2012 à 0:35

 
If this was our last time,
what would we do,
what would we say then?


 

 


Vendredi 9 mars 2012 à 23:13

 

    Il ne m'arrive que très rarement de m'occuper de fait d'actualités, surtout lorsque l'intégralité de ma démarche est fondée sur une mise à distance contemplative et nécessaire du monde qui nous entoure, mais je ne pouvais pas ne pas réagir face à cette nouvelle.


Ne cédez jamais, mesdemoiselles, restez libres et magnifiques. La simple évocation de votre dénomination m'évoque des océans sur lesquels les "dames" les mieux loties ne dériveront jamais. Restez à jamais inmariables, insaisissables. Sans vous, que restera-t-il à écrire ?

 

Jeudi 1er mars 2012 à 16:23

    "Lorsque le chien a déboulé de la cuisine pour me sauter dessus, j'ai eu l'impression de lire dans ses yeux qu'il voulait que je l'emmène loin d'ici. Il était magnifique, un berger gallois tacheté qu'on aurait cru tout droit sorti d'un tableau de Kyffin Williams, et une des plaques de poils noirs s'étendait de toute son oreille gauche jusqu'à l'un de ses yeux, et l'entourait. Elle l'a réprimé sévèrement et il lui a jeté un regard dégoûté avant de se traîner jusqu'à la cuisine. La dame m'a dit qu'elle ne l'aimait pas, qu'il avait fallu le garder sinon c'était la piqure, et qu'elle était humaine, tout de même. J'ai eu la désagréable sensation qu'elle se déchargeait sur ce chien hérité de toutes les imperfections de sa vie ratée, et que l'animal ne devait pas avoir une vie bien agréable. C'était pourtant de loin la plus belle chose qu'elle possédait.

[...]

 

    Sur le lit, la blonde n'avait l'air de rien faire, et je l'ai trouvée belle, et désoeuvrée. Elle nous a regardé en souriant pendant qu'il ouvrait son ordinateur portable, et il ne lui a pas jeté un regard. Je me suis demandé depuis combien de temps ils vivaient ensemble, et depuis combien de temps il ne la regardait plus. Elle restait là, assise, sans bouger, fixe et souriante comme un mauvais tableau. J'ai cherché du regard la fenêtre, comme souvent. Elle était masquée par un tissu rose vaporeux, et sans doute de mauvaise qualité. Elle était sensuelle, presque allongée sur le lit. Lorsqu'il a quitté la pièce, elle m'a jeté un regard adulte, et nous nous sommes tous les deux rendu compte du désir qui venait de nous saisir les reins. Elle devait avoir besoin de plaire à nouveau, et comme souvent, j'avais besoin de m'enfoncer au creux d'une femme. Elle n'a rien fait, mais tout était pourtant dit, dans cette pièce silencieuse qui venait subitement de se charger de ce brouillard pesant qu'est l'envie sexuelle. Malgré tout, je n'ai pas fait un geste, je n'ai pas bougé. Sans doute principalement parce que mon désir s'est très vite mué en terreur lorsque j'ai cru reconnaître le même regard dans ses yeux insistants que celui du chien qui avait voulu que je l'emmène avec moi."




Dimanche 5 février 2012 à 15:19

    Mélancolie latente. La neige, que tout le monde attendait, qui est tombée, inutile, devant mes yeux. Je me suis fait la réflexion légère, comme chaque année, que c'était un vrai symbole de l'enfance, cette neige, et que notre impatience de bambin était déconnectée par les vrais problèmes de la vie, ceux qui tordent le ventre, comme une fiche qu'on désactive, à l'âge adulte. Mon ordinateur ne démarre plus. Impossible d'écrire, vraiment, pendant longtemps, comme je le faisais si bien ces derniers temps. Toute cette neige de merde, et moi, tout seul, dans le train. Mon bouquin dans la poche, c'est souvent Jim Harrison, ça a été Roth, c'était pas si bien, Paul Auster, Modiano c'est Breat Easton Ellis, en ce moment, je ne sais pas encore si c'est bien. J'ai relu Patrick Cauvin, qui est un vrai écrivain, un vrai de vrai, même quand il écrit à la place d'enfants, il sait, il a "ce truc". Didier Van Cauwelaert, bientôt, un très beau livre que j'avais commencé sans jamais le finir. Toujours Jim, toujours les couloirs de cette faculté où je n'ai pas ma place. Une connaissance m'a donné une nouvelle qu'il a écrit, enfin quelques pages, et c'est sans talent, du début à la fin, il y a quelques étincelles, mais c'est totalement stéréotypé, et c'est dommage. Je ne lui dirai pas, je ne lui dirai rien. Ça fait trois semaines. Ça fait cinq mois que je n'ai rien dit à personne je crois. Maxence, un peu tout le temps, se traîne avec moi, il est au courant de tout, c'est un peu le dernier qui est là tout le temps. Mon meilleur ami est parti pour son travail, il a ses problèmes, ses horaires, on se voit moins, toujours avec le même plaisir, mais ce n'est pas pareil que les soirées où on se défonçait en écoutant des disques, la seule personne avec qui je faisais ça. Et puis le train, et la neige. Mes écouteurs dans le métro, le bouquin dans la poche, toujours un peu pareil. Je ne fais rien d'autre qu'écrire, et quand je n'écris plus, c'est reparti pour un tour, tout me hérisse, je ne peux plus approcher de rien, sans être assailli par les angoisses, et puis Maxence est là, alors on se voit. Ma mère s'est brisée la cheville, elle est immobilisée, là, chez-elle, et c'est sûrement moi qui ai peur, mais j'y vois comme une préfiguration de sa vieillesse, et de sa mort. Toujours les mêmes angoisses. Mon père le sent, il est à côté d'elle, il l'aide pour tout, mais je sens qu'au fond de lui, il est terrifié, de la même peur que moi, je le vois dans ses yeux, dans le ton de sa voix, dans son agressivité de grand animal blessé. Il n'a rien résolu. Je reste longtemps devant la cheminée, et une part de moi, la plus horrible veut fuir et foutre le camp, parce que je ne m'y résous pas, je suis terriblement humain sur ce cas de figure.

    Devant la cheminée, je me suis aussi dit qu'on était rien de plus qu'une famille ordinaire, qui se meurt à petit feu, les uns après les autres. La vie m'a révolté, comme souvent. J'ai pensé que la solitude avait cela de fantastique qu'on n'avait pas à voir souffrir ceux qu'on aime. Je me suis dit qu'à la seconde où j'arrêtais d'écrire, je n'étais plus rien. Allongé sur mon lit, tout à l'heure, sur le matelas de Maxence, avec Chloé, et Alban, hier soir, j'ai fait défiler ses photos sur mon téléphone portable. Elle a l'air belle et épanouie, elle n'a pas changé. On a plaisanté, il y a quelques jours, par sms, et moi je riais jaune, et je me perdais dans ses photos. J'ai regretté de ne pas en avoir pris plus. J'ai regretté tout le reste.

La neige, toujours, partout, dégueulasse. Mes colères, pour rien. L'âge adulte.

Mardi 17 janvier 2012 à 19:16

    Quelle était juste, cette expression employée il y a quelques mois : en face d'une femme désirable, les amis les plus proches ne sont plus que des chiens sans collier. J'en ai été un moi-même, j'imagine, mais amoureux, au moins, avec son lot de noblesse et de ridicule. Et quand plus tard, j'apprends qu'une peau que j'ai aimé s'est faite sauter, baiser, pénétrer, quand j'imagine le pied qu'elle a pris, la réalisation du fantasme, le plaisir de se faire culbuter, les yeux révulsés de plaisir animal, subitement, j'ai une légère envie de vomir et de haïr le monde. Mais tout passe, et finalement, rien n'est important. Ni, elle, ni lui.

Ni personne.

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