Dimanche 1er mai 2011 à 1:01

    En fin de soirée, juste après avoir apporté la patte finale à Darjeeling Woods et m'être enivré de cette voix que j'ai entendu mille fois et qui me trouble encore, je suis passé en voiture à quelques kilomètres de chez moi. Les heures étaient chaudes et lourdes, nous roulions doucement, fenêtres ouvertes, laissant derrière nos phares les rues désertes et les volets fermés. J'étais perdu dans mes pensées, accoudé à l'extérieur, lorsqu'une crinière rousse à déchiré la nuit. Elle avançait lentement, ses mouvements décomposés par les phares, dansant presque entre les lueur grises et blanches. Un garçon la précédait, ils riaient, sans prendre garde à notre présence, et au moment que je leur volais. En la détaillant, j'ai aperçu ses lunettes, le piercing, les yeux peut-être. Elle semblait joyeuse, souriait, il l'attendait. Ils ont tournés dans une rue, un peu avant qu'on ne les dépasse.

Cruelle coïncidence et triste cadeau de fin de mixage, j'ai bien peur d'avoir reconnu Tiphaine.


Samedi 16 avril 2011 à 14:31

Parfois j'étouffe au souvenir de toutes les femmes que j'ai possédé sans jamais réussir à les posséder.

Tes soupirs étaient vides de futur, Louise.

Lundi 4 avril 2011 à 21:57

     Et, alors qu'en contrebas passaient au ralenti les trains aux fenêtres éclairés sur les voies noires, alors qu'accoudé à la balustrade, je fumais une énième cigarette en essayant toujours de ne pas penser aux trop bons souvenirs, alors qu'au rythme des dépressions mélancoliques de Ghinzu Paris s'enroulait lascivement dans ses draps de nuit, j'ai vu ma première étoile filante.

Léna a rejoint la poussière de neige.

Dimanche 6 mars 2011 à 19:15

     Peu avant que l'enregistrement ne soit lancé dans mon casque, j'ai éteins les lumières de la cabine. Quelques photos d'elle flottaient sur l'écran de mon ordinateur portable, quelque part en dessous du micro. Tout était prêt. J'ai amèrement pris une gorgée de mon verre, en entendant les premiers accords défiler dans mes oreilles. Les autres chansons ne m'avaient pas demandé une telle préparation. A quelques centimètres sur ma gauche, Tiphaine me regardait étrangement, des quatre photos les plus représentatives que j'ai du trouble de ses yeux. J'ai senti mon coeur descendre dans ma poitrine. Il fallait que je me souvienne. Il fallait que je me rappelle de ses sourires tristes, de son regard perdu loin à l'extérieur de la vitre du car, de ses hésitations, de son "J'ai envie de te voir ... On se voit quand ?" qui avait laissé place au silence glacial, et à l'oubli. 
    Le plus terrible à été, je crois, de se rendre compte que ma mémoire n'est pas infaillible, et que petit à petit, Tiphaine est en train de s'effacer de ma mémoire. Son visage me parait de plus en plus flou, ses sourires, toutes ses manies et ses attitudes qui m'avaient rendu fou d'amour semblent m'échapper aujourd'hui. Je ne veux jamais l'oublier, mais le temps fait son oeuvre de mort, et oxyde son visage et ma passion, lentement, petit à petit.
    Lorsque le piano a recommencé et qu'il a été temps pour moi de me placer correctement face au micro, j'étais dans l'émotion correcte. J'avais peur, peur de l'oublier, et mal au coeur, parce qu'il ne se passe toujours pas une semaine, presque deux ans plus tard, sans qu'elle me hante perpétuellement, sans que je l'imagine au détour d'un métro, d'un concert, d'une rue vide. En lançant mes premières paroles au micro, j'ai pu mentir comme il le fallait. J'ai pu lui dire de m'oublier, de refaire sa vie. Quel beau mensonge. Je veux qu'elle me retrouve. Plus que tout, je veux la revoir.

    Aucune fille, je dis bien aucune, de Charlotte à Léna, ne m'a autant hanté, aussi longtemps, aussi durement. Je ne vois qu'elle, fantôme quotidien de ma vie de tous les jours, et maintenant j'ai peur, bon sang, j'ai peur que son visage ne s'efface de ma mémoire avant d'avoir pu la revoir au moins une fois.

Ne m'oublie pas.

Mercredi 19 janvier 2011 à 18:33

        Léna a pris beaucoup d'importance.

 

    On s'est embrassés, rue des Lombards, longtemps. Elle m'a fixé un objectif. J'ai arrêté de coucher à droite à gauche, complètement. Dis non à certaines filles. Je lui ai offert une rose blanche, qui portait le même nom qu'elle. On s'est vus, beaucoup, le long des quais de Seine, elle m'a parlé de ses parents, de sa vie, elle m'a montré son coin préféré de Paris, sublime. Alors que le soleil se couchait, il a reflété son éclat rose sur les flots de la Seine qui ont subitement changés de couleur. Dans la lueur du soir couchant, elle était subitement presque rousse. Elle souriait beaucoup, m'a remercié pour cette parfaite journée.

  Je me suis attaché à Léna. On s'appelait, pas mal, je lui ai fait découvrir la musique que j'écoutais, elle a adorée, je l'ai présenté à mes amis, tout s'est très bien passé. J'ai commencé à penser à elle, le soir, avant de m'endormir.

  Et puis rien n'était clair, elle ne savait pas, elle voulait voir. Savait-elle ce que j'avais ressenti en l'embrassant une première fois au milieu des pavés de Beaubourg, lorsqu'elle s'était réfugiée dans mon cou ? Etait-ce l'alcool qui parlait, mais pourquoi aussi longtemps, et pourquoi encore une fois, rue des Lombards, pourquoi cette intensité ?

   Aujourd'hui, je cours, parce qu'il faut que je pense à autre chose, je cours comme un dératé sur mon tapis de salle de sport, parce que je ne sais rien faire d'autre, qu'il faut que je t'oublie, que je pense à autre chose. Et je me rends compte que je n'ai plus aucune raison de courir. Cette après midi, comme tous les jours, j'ai eu envie de t'envoyer un mot, de t'appeler, mais tu as été assez clair, nous n'avons pas d'avenir, trop compliqué, toi qui sort d'une trop longue relation, qui ne te voit avec personne. Moi je me voyais bien avec toi. Je nous voyais vraiment ensemble. 
 

Il y a une rose qui finit de mourir, quelque part près d'une fenêtre, dans ton appartement. Je n'ai pas cette chance. 

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