Lundi 24 octobre 2011 Ã 0:24
    Elle s'appelle Endorphine, et je la préfère le soir, dans la lueur des phares qui s'éloigne...
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J'ai trouvé le prénom de la fille, grâce à elle. Je le donnerai plus tard. Elle a conservé ses sous-vêtements dans son sac, après l'amour. Détail troublant.
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" Au même moment ailleurs, on se préparait à sortir, on soignait son apparence. Des mauvais garçons devaient glisser quelques capotes dans les pochettes arrière des portefeuilles, en espérant s'en servir avant la fin de la nuit. On attendait les voitures qui viendraient nous chercher. Bientôt, on reléguerait la solitude pour quelques heures nouvelles d'extase et d'abandon. On danserait sous les lueurs traumatiques et syncopées des spots. Les corps se découperaient, s'entrelaçeraient. On saisirait une fille à bras le corps, peut-être, on la prendrait à la passion dans un appartement obscur dont la nuit nous cacherait les contours. Le désir arrogant, qui n'écoute personne, m'a fait légèrement trembler, un début d'érection mal placé s'est emparé de mon bas-ventre. Dans quelle optique ? J'ai repensé à Mathilde. A ses seins nus. Peut-être à défaut d'une mère avais je besoin de m'abandonner entre les bras d'une femme. Les endorphines libérées par un orgasme sans plaisir m'accorderaient tout de même le sommeil.
   -Tu refumes ?
   Il semblait tiraillé par l'idée de la cigarette, et massait nerveusement de son pouce l'emplacement vide et jauni entre son index et son majeur.
   -Tu en veux une ?
   -Non… Je ne fume pas.
   Il a reposé le paquet, presque soulagé. Il n'était pas rasé, et une maigre barbe blanche commençait à envahir son visage vieillissant.
   -Non, moi non plus.
   Il a montré la table d'un coup de menton.
   -Le costume, c'est pour toi.
   J'ai regardé l'ensemble noir. Il a reprit :
   -Il faudra que tu l'essayes, mais c'est le seul.
   Je n'ai pas répondu. Il était sûrement un peu court. Le costume avait d'évidence été acheté pour Gabriel, sans qu'il ne l'utilise qu'une ou deux fois. J'étais un peu plus grand, un peu plus maigre, mais ce n'était l'affaire que de quelques centimètres. Si je l'avais revu, il ne m'aurait sûrement, comme à son habitude, pas adressé la parole. Et pourtant dans deux jours, j'enfilerai son costume, et j'irai l'enterrer.
   -Une pluie comme ça en juin… C'est du gâchis.
   Small Talk. Du babillage. C'était une étudiante américaine qui m'avait appris l'expression, à l'époque où j'allais encore traîner dans les bibliothèques pour faire semblant d'y préparer mes diplômes. Elle était petite et vive, et m'avait soutenu qu'on ne faisait jamais plus de small talk qu'avant de faire l'amour. Avant de la prendre contre la commode de son minuscule studio, j'avais refusé de lui adresser la parole, par simple esprit de contradiction."
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