Sans préliminaires aucun, il faut que je vous fasse partager ce sentiment que j'ai vêcu il y a trois jours, mon coeur explosant, mes mains tremblantes, les regards de complicité, la musique, enfin, et en tout.
Vendredi, nous avons avec mon groupe de musique effectué notre première répétition dans un studio de musique, les Basement, à Paris, avec du matériel de live, des micros, des tout ce que tu veux à portée de main.
On a décidé de jouer Slowing Our Heart Beats, qui n'est que l'intro d'une chanson inédite nommée "Enfer Et Contre Tout." J'aime beaucoup cette composition, parce qu'elle est fiévreuse et hantée, et c'est ce que je veux atteindre dans ma musique, un stade où les notes de piano foutent mal à l'aise et déchirent les entrailles, un stade où je m'emporte à mon micro, pris dans les paroles et l'intensité de ce que j'essaye de faire passer.
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C'était la première fois que je me mesurais à un micro par rapport à une composition, surtout une aussi personnelle et intense. Comment exprimer ça... C'est comme un sentiment qui part de très loin dans les entrailles et qui commence à faire trembler votre corps entier. Ma jambe bat la mesure, et je sens la fièvre envahir mes épaules, mes bras. Mes mains se crispent sur le micro, et pendant que la fièvre gagne mes yeux, je commence à chanter la lente descente aux enfers de la chanson. Open chord de la, piano hanté, répétitif, imposant.Â
Break.
"Je reste enfer, et contre tout, je reste enfer, et contre toi". Déchainement. Le piano prend toute sa mesure sur sa nouvelle structure et me déchire les entrailles, je me balance compulsivement comme agité par la souffrance que j'essaye de faire passer à ceux qui m'écoutent. J'ai sorti le micro du stand, il est collé contre moi dans ma main gauche, mon autre main se saisit du stand et le presse entre mon torse et mon bras droit, oscille, chancelle avec. Je déraille. La chanson se termine sur un cri de frustration, bref, et sans appel. Je met cinq secondes à revenir à la réalité. "Bon, elle était pas mal, il faudrait qu'on la reprenne pour bien fixer ces guitares, surtout pour la transition à la fin de l'intro. Okay."
Pendant six minutes, j'ai été catapulté en enfer. Dans mon enfer, mes passions, mes pulsions, j'ai pu enfin extérioriser ce qui me ronge. C'était fantastique. Je suis taillé pour le live, je sens qu'il me bouscule de l'intérieur, qu'il ne cherche qu'à sortir, à montrer au monde ce que c'est que ma détresse.
Les gens jugeront de notre talent, mais ils ne pourront pas dire que je manque d'intensité. L'intensité, la fièvre, voilà ce qui me lance et me poursuit, me colle devant un micro, me fait chanter. Parce que quand le dernier son mourant s'échappe de mes lèvres, j'accède enfin à ce que mon corps assailli réclame depuis bien longtemps.
L'apaisement.
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