Je les hais de n'être qu'à moitié précis, de devenir flous, d'échapper à notre mémoire et de danser avec nos sentiments. Je les hais de s'embellir et de se fausser. Je les hais de disparaître ou de nous hanter. Je hais les souvenirs parce qu'ils sont beaux, qu'ils me rappellent que tout est terminé, que ce que je recherche à été tiré en arrière, avalé par la nuit noire.
Il faut chérir le présent parce qu'il n'y a plus que lui. Parce que tout le reste est mort, et que personne ne reviendra pas en arrière. Il faut chérir l'instant présent parce que bientôt, il ne sera plus que poussière entre nos doigts, et que seul nos yeux embués de larmes et notre gorge serrée nous rappellera à quel point c'était bien, et à quel point nous avons aimé ces moments auxquels personne ne faisait attention sur l'instant.
J'ai peur de perdre tous les instants de ma vie de ces trois dernières années. Elles s'effacent déjà , toutes celles qui m'ont nouées le ventre, elles disparaissent sans s'en apercevoir elles mêmes, perdues dans le tourbillon de leur propre vie, qui ne m'inclut plus.Â
     Elles disparaitront, toutes, aussi importantes soient elles, elles s'effaceront, et rien que je ne puisse faire y pourra changer quelque chose. Je les écris, vite, pour ne pas perdre ce qu'elles m'inspiraient, mais qu'est ce que des mots, quand tout mon corps s'enflammait pour trois paroles prononcées, pour un frôlement, pour une posture. A quoi servent les souvenirs, puisqu'ils ne ravivent rien de vivant ?
Parfois ma gorge se serre, mon ventre se noue, mon regard se noie. Et alors que j'observe les femmes que j'ai aimées s'effacer dans le néant, je comprends que les mots sont inutiles.